La vie d'une Quiche

Compréhension

En fait, c’est maintenant que je suis loin de mon frère que j’arrive un peu mieux à le comprendre… Enfin, je veux dire, il n’y a jamais vraiment eu de problèmes de communication entre nous deux. On est super proches mes frangins et moi. Seulement, il y a des moments où on ne l’est pas vraiment… Dès que les bulletins de notes arrivent… Parce que mon frère n’a pas vraiment eu beaucoup de chance. D’un côté il avait sa super grande-soeur qui accumulait les compliments des professeurs sur son sérieux, son travail et ses notes plus qu’acceptables et de l’autre côté, une petite soeur tout simplement parfaite à ce niveau, quoiqu’un peu trop discrète. Et il m’a toujours fait comprendre qu’il m’en voulait pour ça. Qu’il m’en voulait d’être aussi "parfaite" parce que du coup, les parents le comparait toujours à moi. Il est le seul à bavarder, le seul à ne pas être vraiment sérieux et ne pas se donner à fond dans ce qu’il fait. Ce qui me faisait doucement sourire parce que, d’accord, je n’ai jamais bavardé, j’ai toujours été sérieuse, mais je me suis tout comme lui toujours reposé sur mes lauriers. Seulement, moi j’avais pigé comment ne pas le montrer et faire croire aux profs que je donnais le meilleur de moi-même… Mais Yo' n’a jamais été un bon acteur, encore moins un bon menteur.

Du coup jusqu’au lycée, il tenait cette petite rancœur contre moi. Puis au lycée, mes notes ont commencé à baisser. Il a commencé à dire aux parents que finalement je n’étais pas si un bon exemple que ça et finalement, il a eu sa petite "vengeance" en quelque sorte. Ca a duré pendant trois ans. Dès qu’il avait une mauvaise note j’avais le droit au "Mais Cynthia elle a eu que 6 de moyenne en Maths". Et ça m’énervait. Ca m’énervait parce que je m’efforçais d’effacer ça de la mémoire des parents. Je m’efforçais d’effacer ça de ma mémoire à moi. Je me sentais comme la plus grosse nullité de ce monde. Même pas bonne pour servir d’exemple à ses frangins. J’avais juste tellement honte. Du coup, j’ai arrêté de faire des remarques à Yo' comme quoi il devait sérieusement se reprendre parce qu’il était en train de jouer son avenir. Je n’étais plus du tout crédible avec mes moyennes en-dessous de 10…

Puis à la fin de la Terminale, j’ai eu mon bac S. Malgré mon 7 en maths, j’ai réussi à avoir mon bac avec la mention assez bien. Et du coup, j’ai réussi à regagner un peu le "respect" de mon frère. J’étais l’exemple même que même avec des notes pourries tout au long de l’année en maths et une note toute aussi pourrie au bac, si on essayait vraiment de se renforcer dans les matières où on assurait déjà, et bien ça pouvait passer. Et du coup, plus que jamais j’étais la preuve vivante que même s’il n’avait pas toujours les notes qu’il devrait avoir s’il travaillait réellement, et bien lui aussi pouvait réussir.

En fait, plus vraisemblablement, je crois juste qu’en ayant eu des sales moyennes à mon tour, et pire, en ayant foiré ma prépa, je suis devenue plus humaine à ses yeux. Plus à même de comprendre ce qu’il pouvait ressentir en ayant des sales notes et du stress que la réaction de Papa pouvait apporter. Et du coup, il est plus à même d’écouter ce que je lui dis, étrangement. Ou peut-être que j’ai arrêté de penser qu’il fallait absolument avoir de bonnes notes pour être heureux et qu’en fin de compte, la réaction de Papa n’est pas si "terrible" que ça, si on se débrouille pour arranger les choses derrière.

Enfin bref, j’arrive mieux à cerner mon petit Yo', et c’est franchement bien. J’ai l’impression que je suis une meilleure grande-soeur en étant loin d’eux. Forcément, ils me manquent, donc je suis plus à l’écoute et je ne suis pas obnubilée que par mes petits problèmes…