Enfance heureuse
On revient d’un weekend chez les parents du Chéri. Un weekend assez agréable à mes yeux et ceux de Youyou, mais toujours un peu éprouvant pour le Chéri. Il est constamment braqué avec sa famille. Je crois qu’il compare beaucoup sa famille avec la sienne. C’est vrai que sa famille est constamment dans le reproche. Ce n’est pas foncièrement méchant, je pense, mais ça n’aide pas à se construire correctement. C’est soit pas assez ou trop. Ils lui donnent l’impression qu’il ne fait pas correctement avec Youyou, en tant que père. Parce qu’il la secoue trop, qu’elle bouge trop, qu’elle ne dort pas seule, qu’elle pleure quand on la contrarie (à cet âge, quoi de plus normal...) et lui ça l’agace. Et puis son frère qu’il n’a pas vu depuis 8 mois qui lui fait d’après lui des leçons de moral sur la vie de travailleur ou je ne sais quoi, ça n’arrange pas. Ça et les petites remarques racistes que toute sa famille égrainent sans même sans rendre compte dans la discussion. Comme sa sœur qui me disait que dans le centre aéré (enfin, l’accueil extrascolaire) où elle travaillait, il n’y avait que deux français et les autres étaient africains ou arabes alors que bon, ils devaient quasiment tous être français, mais pas forcément blancs… Bref, ce genre de petites remarques anodines qui ont le don de mettre le Chéri dans un état d’énervement assez impressionnant.
Alors oui, forcément, la comparaison avec ma famille qui reconnait tout ce qu’il fait pour Youyou, et plus que bien vu l’éveil de cette dernière, est un peu rude. Et comme il me disait hier pendant que je faisais la vaisselle et lui la cuisine : mes parents ne nous "reprennent" pas sur notre façon d’élever Youyou. Quand ils la gardent, ils font à leur sauce, mais quand on est présent, ils nous suivent. Et si on dit "non" (c’est rare, mais ça arrive), c’est non, et point. J’en prends l’exemple des boucles d’oreilles que Maman voulait absolument que Youyou ait. Je lui ai expliqué que le Chéri préférait que ça soit fait à la demande de mininous et que quand elle le ferait, ça serait fait chez un perceur et pas au pistolet parce que ça le rassurait sur le côté hygiène. Elle a compris, elle n’insiste plus. Et je sais qu’elle ne s’amusera pas à le faire dans notre dos. Encore heureux…
Bref, hier le Chéri était un peu sur les nerfs à propos de sa famille, comme souvent quand on en revient, mais on en a parlé et ça va mieux. Par contre, j’avoue que ça ne m’aide pas beaucoup à imaginer positivement la semaine que Youyou passera toute seule à un moment en novembre chez eux… J’ai pas envie qu’il laisse pleurer mon pauvre bébé ou qu’elle se fasse réprimander parce qu’elle est pleine de vie… J’aime moi que ça soit une tornade, qui chante, qui bouge et qui ne s’arrête jamais, jusqu’au moment où le sommeil fini par la rattraper. C’est épuisant, mais c’est rassurant. De toute façon, à ce moment-là je serai en télétravail donc au moindre soucis, j’y fonce et je récupère mon bébé. Enfin, je redoute surtout pour les siestes et les nuits, parce que le reste de la journée, elle aime bien rester avec eux, mais le sommeil, c’est le point faible de Youyou. Ça et les changements de couche vu qu’elle ne veut pas que sa mamie la change (elle a dû le faire une seule fois...)... Est-ce que je peux espérer qu’elle soit propre d’ici là ?
Quoiqu’il en soit, ce matin j’ai eu une de ses fameuses impressions bizarres qui me replongent durant une fraction de seconde dans le passé avec les odeurs, les images, les couleurs et les sons associés, comme une essence de souvenir fugace qui m’a fait me dire que, quand même, j’ai eu une enfance sacrément heureuse… J’ai revu un souvenir de rentrée pluvieuse où j’étais toute fière dans mes jolis vêtements que j’avais acheté avec Maman. Je me suis revue en été courir à côté de la voiture de Papa pour rentrer à la maison après un après-midi passé avec Doriane. Je me suis revue à la Voûte, en train de négocier avec Yo' et Sa' pour ne pas dormir près du mur aux toiles d’araignées inexistantes. En train de jouer avec eux aux Barbies et créer des histoires plus extraordinaires les unes que les autres. J’ai revu nos soirées télé, tous ensemble posés devant la télé à parler à tort et à travers de tout et n’importe quoi pendant que Papa essayait difficilement de suivre ce qu’il se passait sur l’écran. De nos séances photos, à Sa' et moi ou bien avec toute la famille devant lesquelles je continue de verser des larmes de nostalgie quand je les revois. Les vidéos débiles que je faisais avec Sa' avec la webcam de mon ordi portable qu’on regarde encore à en rire aux larmes à l’heure actuelle. Les jeux dans le jardin avec les frangins, les copains de Yo' ou les petits voisins, ou bien seule avec Momo. Les étés chez Bouh. Les négociations pour ne pas faire les deux pages des cahiers de vacances. Le dernier jour d’école quand tu te rends compte que tu vas pouvoir te réveiller à pas d’heures les deux mois qui suivent. Tout ça en une fraction de seconde. C’est comme une bouffée de vie qui me dit : fais en sorte que ta fille ait les mêmes souvenirs. Ça me ferait mal qu’elle oublie comme son père a oublié tout un pan de son enfance. Je ne sais même pas comment on fait pour avancer sans tout ça quelque part en tête. Sans tous ces moments qui reviennent vers toi, quelques fois, sans que tu t’y attendes pour te donner un nouvel élan. Ou alors suis-je trop nostalgique ? J’avouerai que, quelques fois, si je pouvais revivre ces moments dans mes rêves, ça me ferait grandement plaisir.
C’est comme, en ce moment, j’ai des impressions de ma fin de grossesse pour Youyou qui reviennent. L’époque où je restais avachie toute la journée à regarder en continue des épisodes de La Maison des Maternelles en espérant que le Chéri écoute au moins d’une oreille pour qu’on se mette d’accord sur notre fil conducteur d’éducation (ce qu’il a parfaitement fait malgré la lassitude qu’il affichait quelques fois selon les intervenants...). Le tout en buvant une quantité phénoménale d’infusion au miel. Ou de miel à l’infusion selon le Chéri… Et j’avais un peu oublié cette période jusqu’à présent. C’était une période sympa, mais que j’ai vite éclipsé de ma mémoire à l’arrivée de Youyou. Mais en ce moment, presque quotidiennement, cette impression m’envahit et j’ai hâte de la retrouver. Même si elle sera bien plus agitée que la première fois vu que la première fois : il n’y avait pas mini tornade…
Écrire sur mon enfance me donne envie d’aller me réfugier au plus vite chez les parents. Une semaine sans les voir, ça fait long mine de rien… Vivement vendredi !